Le dossier de Mareck Dupuis est désormais entre les mains du juge Jean Asselin qui va prendre le temps d’analyser les arguments des deux parties pour rendre une décision, qu’il juge difficile, le 22 mars prochain.
« Cela fait neuf ans que je siège et c'est probablement la peine la plus difficile que j'aurais à rendre, ça demande réflexion. Je sais que les procédures judiciaires sont longues et j’en suis désolé, mais je dois peser les éléments et tenter de rendre la peine la plus juste et la plus appropriée en vue des circonstances », a-t-il indiqué en fin d’après-midi, après une journée de témoignages.
Rappelons que Mareck Dupuis a été reconnu coupable de conduite dangereuse causant la mort et de conduite dangereuse causant des lésions suite à l’accident survenu le 16 janvier 2018 à l’intersection de la 118e Rue et du boulevard Lacroix, à Saint-Georges. Anne-Sophie Veilleux est décédée lors de l’accident et Laurie Pelletier a été gravement blessée.
Des témoins à la barreEn effet, les émotions étaient fortes aujourd’hui au palais de justice de Saint-Joseph-de-Beauce, alors que cinq témoins et l’accusé sont venus à la barre témoigner dans cette affaire.
Ce sont les témoins de la Couronne qui ont parlé en premier.
Présente virtuellement, Laurie Pelletier était la meilleure amie d’Anne-Sophie Veilleux. Ce jour-là, elles se rendaient ensemble au Cégep pour changer leurs horaires et avoir plus de cours en commun. Dans son témoignage, la jeune fille de 22 ans confie ne pas se souvenir d’avoir vu le camion, mais simplement de son réveil sur les lieux de l’accident puis à l’hôpital. Passagère de la voiture accidentée, elle a subi des blessures importantes qui ont nécessité près d’un an de suivi médical. Le cœur lourd et avec beaucoup de force, elle a raconté sa version des faits et les émotions qu’elle a traversé dans cette épreuve.
Par la suite, la mère de la victime, Manon Mathieu, a pris la parole pour raconter son histoire, du jour de l’événement à aujourd’hui. Elle a témoigné avec émotions avoir vécu des moments très difficiles et ne plus être la Manon qu’elle était. Très proche de sa fille, c’était une femme souriante et toujours heureuse selon ses propres mots.
Du côté de la défense, c’est Mareck Dupuis, sa sœur, une amie de la famille, sa mère et sa psychologue qui ont exprimé leur ressenti.
L’avocat de la défense, Me Bertrand, a interrogé son client sur sa vie familiale, son parcours scolaire, ses suivis psychologiques et ses activités professionnelles. Par la suite, ce dernier a lu une lettre s’adressant au juge dans laquelle il s’excuse de l’acte qu’il s’est passé. Il a indiqué avoir beaucoup prié pour Anne-Sophie, Laurie et leur famille. Il a également précisé qu’être conducteur de camion était un rêve d’enfant pour lui, mais qu’il ne souhaitait plus faire ce métier maintenant.
Les autres témoins ont présenté l’accusé comme une personne de confiance, introvertie, généreuse. « C’est un garçon tranquille, calme, à sa place. Je ne connais pas beaucoup de jeunes de son âge qui sont autant travaillant », de dire Nathalie Lauzon, une amie proche de la famille qui a un enfant du même âge.
Pour sa part, Nathalie Vachon ressentait de lourdes émotions elle aussi au moment de se présenter à la barre. Elle a déclaré combien son fils se sentait coupable dans cette affaire, qu’il priait beaucoup et que c’était très dur pour lui psychologiquement.
Pour finir, sa psychothérapeute a indiqué avoir eu une cinquantaine de rencontres avec Mareck Dupuis depuis avril 2019 où elle a commencé à le suivre. L’objectif étant de faire baisser sa culpabilité et l'anxiété. D’après elle, l’accusé est rempli de tristesse « le mot tristesse est pas assez fort, détresse plutôt ». Elle a terminé en précisant que Mareck n’est pas apte à conduire un camion, mais qu’il serait pour une voiture.
Plaidoiries des partisÀ la suite de plusieurs heures de témoignages est venu le temps des plaidoiries de chacun des partis.
En premier, la procureure Me Annik Harbour a fait un résumé de ce qui a été dit plus tôt soulignant d’abord quelques facteurs atténuants pour l’accusation. Parmi ceux-ci on retrouve le soutien de la famille, le dossier de conduite plutôt correct, l’expression de remords, des suivis psychologiques assidus ainsi qu’une enfance difficile. Elle a aussi noté qu’il n’y avait pas de drogues ni d’alcool impliqué dans l’événement.
Cependant, en ce qui concerne les facteurs aggravants, la couronne a rappelé que c’est un conducteur professionnel, donc il a été formé pour conduire des véhicules lourds. Qui plus est, il a commis une erreur de conduite plus tôt dans la même journée et n’a pas entrepris de faire une pause ou de prendre du temps pour se ressaisir. Enfin, il a également failli à plusieurs règles de sécurité routière au moment de l’accident puisqu’il roulait à une vitesse plus haute que celle autorisée, il n’a pas adapté sa conduite aux conditions météorologiques et a brûlé un feu rouge.
Pour soutenir sa recommandation de peine, elle a présenté plusieurs dossiers similaires à la cour et les jugements qui ont été fixés. Mais Me Harbour a précisé que « d’un côté comme de l’autre, c’est un drame. Il faut tout considérer. »
Sa recommandation est donc une peine de 18 mois d’emprisonnement ainsi que trois années de probation sous conditions, notamment de ne pas communiquer avec les familles des victimes ni avec Laurie Pelletier. À cela pourrait s’ajouter une interdiction de conduire pendant deux ou trois ans après sa détention.
Par la suite, Me Bertrand, représentant de Mareck Dupuis, a fait sa plaidoirie à son tour. Tout comme le juge et la procureure, il a souligné la difficulté de ce procès. « Je suis d’accord avec ma collègue sur le fait que c’est un drame humain incroyable. En 31 ans de pratique, c’est une des auditions sur la peine que j'ai trouvé la plus difficile. »
Ce dernier a essentiellement basé sa plaidoirie sur une faille dans le plan de suivi psychologique qu’avec Mareck Dupuis au moment des faits. Il est aussi revenu sur les problèmes psychologiques de son client qui jouent sur sa responsabilité.
Il a demandé au juge detenir compte de l'effet dissuasif de la procédure judiciaire qui, dans ce cas, a commencé dès le lendemain de l’accident lorsque Mareck a été arrêté par la police. « Si je ne me trompe pas, depuis le 19 janvier 2018 Mareck vit avec le glaive du processus judiciaire et ça marque. » Autorités avec lesquelles il a très bien collaboré.
La défense a également rappelé quelques circonstances atténuantes, notamment que l’accusé boit très peu d’alcool, qu’il ne consomme pas de drogue, qu’il est proche de sa famille et qu’il s’occupe beaucoup de ses neveux et nièces.
Sa proposition de peine ne comprend donc pas de peine de prison, estimant que le taux de récidive est extrêmement faible, « voire inexistant », surtout qu’il est toujours suivi psychologiquement et qu’il ne souhaite pas conduire à nouveau.
« La peine n’est pas un moyen de réconfort, elle ne compense pas le chagrin et la douleur des personnes atteintes », a-t-il ajouté.
Tout comme sa consoeur, il a présenté d’autres dossiers similaires et les jugements de ceux-ci pour justifier sa proposition.
Ainsi ce dernier estime que les conditions de probations pourraient être les suivantes :
À cela il précise que le juge peut exiger une amende s’il estime que ce n’est pas assez. Ainsi, l’avocat suggère une probabtion ainsi qu’une amende de 2 000 $ qui s'ajouteraient aux conditions de probations citées précédemment.
« De façon très subsidiaire, ce serait une peine discontinue de 90 jours à purger les fin de semaine, mais encore une fois avec la probation et les mêmes conditions », a-t-il terminé.
Avant de fermer la séance, le juge a demandé à la défense si son client serait disposé à faire du service communautaire et s’il pourrait faire une donation à une association qui vient en aide aux victimes. L’avocat a répondu oui dans les deux cas.
La décision du juge Jean Asselin sera rendue le 22 mars prochain au palais de justice de Saint-Joseph.
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