Je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Une époque révolue où cassettes vidéo et magnétoscopes régnaient en maîtres dans les foyers. Celle d'une technologie d'enregistrement de signaux vidéo sur bande magnétique qui change le visage du cinéma, bouleverse l'industrie et démocratise la vidéo. Pas mal pour une petite boite noire et l'encombrant appareil qui permet de la lire. Il y a 40 ans : l'invention de la VHS, une révolution dont l'industrie du cinéma se souviendra Il y a 40 ans : l'invention de la VHS, une révolution dont l'industrie du cinéma se souviendra

Le Betamax est mort, vive le VHS

Impossible de parler du VHS sans d'abord évoquer son grand concurrent, le format Betamax de Sony. En 1975, la firme japonaise est la première à se jeter à l'eau. Sa machine à enregistrer et ses cassettes à bande magnétique lancent la vague du rembobinage grand public.

En voici les quatre commandements : introduire sa cassette, lancer l'enregistrement; rembobiner la bande et regarder. Révolutionnaire, parce que jusqu'ici, le magnétoscope, inventé au début des années 1950 était un outil presque exclusivement réservé aux professionnels.

Un Sony Betamax de 1975

Il y a 40 ans : l'invention de la VHS, une révolution dont l'industrie du cinéma se souviendra

L'appareil est cher, mais les téléspectateurs se l'arrachent. C'est un tsunami qui inonde le marché américain et chamboule les rapports de force établis dans l'industrie du divertissement filmé. Même si le Betamax est rapidement détrôné par la norme VHS de JVC (moins cher et avec une durée d'enregistrement plus longue), c'est lui l'étincelle qui amorce les révolutions culturelles qui vont jalonner la décennie suivante.

Halte, au voleur !

La cassette, ce Robin des bois des temps modernes. Honnie par les grands studios de cinéma américains et les chaînes de télévision à ses débuts, elle redistribue les cartes d'une industrie réputée très conservatrice. Les Majors crient au vol et au pillage, les consommateurs libérés des contraintes du programme télévisé se frottent les mains.

Elle ouvre des horizons inédits à des petits malins qui s'en servent pour supprimer la publicité des enregistrements et regarder leurs films sans coupure. Un manque à gagner énorme pour Hollywood à l'époque où la réclame est partout à la télévision.

Un magnétoscope et une cassette VHS

Ajoutez-y des droits d'auteur bafoués et c'est la goutte d'eau. Face au gouffre financier, l'industrie joue son va-tout en collant un procès à Sony, sans plus de succès. Les Majors sont déboutées après presque dix ans de bataille judiciaire et un passage devant la Cour Suprême.

La massification de la VHS est en marche, des dizaines de millions de personnes l'utilisent et rien ne semble pouvoir l'arrêter. De menace, elle devient vite une opportunité économique pour les producteurs. Pourtant, ils sont loin d'être les premiers à sentir le bon filon. Un nouveau type de magasins apparaît, le vidéoclub, un lieu dédié à la location de cassettes, encore trop chères pour être accessibles à tous.

Porn to be alive

L'envol des enregistreurs n'a d'abord rien à voir avec les géants du cinéma. En investissant des sommes folles pour la distribution de leurs blockbusters quelques années après, ils finiront par contrôler le marché. Par contre, c'est un tout autre oiseau qui le fait décoller : le film pornographique, une espèce rare et un fruit défendu.

Bon promotionnel pour des VHS érotiques

Ils sentent le potentiel de la nouvelle technologie et les films X envahissent les étals des vidéoclubs. Sans surprise, les américains adhèrent et le sexe sur cassette se fait aussi une place de choix dans l'intimité des salons. Voilà donc que les cassettes VHS et leur porno questionnent les valeurs morales du cinéma en poussant l'Amérique puritaine dans ses retranchements. Elle n'est d'ailleurs pas au bout de ses peines et rapidement, le film d'épouvante la fait passer d'une horreur à une autre.

VHS de certains des films d'horreur les plus cultes (crédit : Collectors Weekly)

Cannibal Holocaust, Evil Dead ou Anthropophagus... autant de films trashs et gores, symboles d'une nouvelle vague décomplexée qui trouve dans la VHS son terrain d'expression. Les réalisateurs ne s'interdisent rien et montrent à l'écran des atrocités qu'ils n'auraient jamais pu projeter en salles. Pour le plus grand plaisir des adolescents et des jeunes adultes de l'époque.

Retour à la niche pour les pionniers

Toutes les bonnes choses ont une fin. Gore, porno et autres contenus subversifs ont le quasi-monopole du marché pendant quelque temps, mais au final, c'est (presque) toujours Hollywood qui gagne. Le secteur brasse bien trop d'argent pour rester indéfiniment l'apanage de quelques précurseurs. Alors que les films grand public sont désormais massivement déclinés et vendus sur cassettes, les chaînes de vidéo-clubs apparaissent et Hollywood reprend progressivement la main.

Les cassettes Disney symbolisent bien la reprise en main de studios (crédit : SoBusyGirl)

En 1987, la célèbre franchise Blockbuster fait entrer la location de VHS dans une nouvelle ère, celle du capitalisme de la cassette et de son magnétoscope. Le secteur se range et devient bien plus sage sous l'impulsion des studios. Les revenus de la distribution explosent, tellement qu'ils dépassent bientôt ceux des films en salles.

Peu l'auraient prédit, mais la cassette VHS relègue le cinéma au rôle de simple produit d'appel, un banal outil marketing utile pour la promotion des petites boites noires. Inédit à une époque où les salles obscures étaient encore le divertissement par excellence.

Intérieur d'un magasin de la franchise Blockbuster (Crédit : Kim Komando Show)

Hollywood a pris le virage à temps et a sauvé les meubles en retournant sa veste. Depuis, le schéma s'est reproduit avec le DVD et le cinéma subit aussi la concurrence des plateformes SVOD comme Netflix. Le format VHS a fait son oeuvre et d'autres technologies l'ont remplacé depuis longtemps, sans jamais révolutionner autant l'industrie qu'il ne l'a fait pendant ses décennies de gloire.

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